AU SUJET DES ARRIÉRÉS PAYÉS AUX FONCTIONNAIRES REACTION DE L’ANCIEN MINISTRE KOUTCHE
AU SUJET DES ARRIÉRÉS PAYÉS AUX FONCTIONNAIRES REACTION DE L’ANCIEN MINISTRE KOUTCHE
Le Chef de l’Etat et son gouvernement auraient payé environ 87 milliards de nos francs d’arriérés aux fonctionnaires de l’Etat et aux retraités. Si ces arriérés étaient réels, cela suppose qu’ils figurent comme passifs dans les comptes de l’Etat. En effet, les règles en matière de gestion de la dette exigent que tout arriéré en monnaie locale dont la durée dépasse 90 jours soit comptabilisé dans l’encours de la dette intérieure.
Dans mon obligation d’éclairer le peuple en tant que dernier Ministre des Finances du président Boni Yayi, je me suis exercé à faire une appréciation analytique des chiffres contenus dans les documents officiels du gouvernement lui-même. Dire simplement que le régime Boni Yayi n’a jamais laissé de tels arriérés pourrait amener beaucoup à penser que je suis dans l’auto-défense. J’ai alors choisi de confondre le gouvernement sur son propre terrain avec ses propres données.
J’ai d’abord fait recours au #bulletin statistique de la dette publié par la Caisse Autonome d’Amortissement au 30 juin 2020. Il en ressort que la dette privée, ainsi que figurant dans ledit bulletin, est constituée de 76,92% d’emprunt obligataire, de 7,14% de bons de trésor, et de 15,93% de financement bancaire (voir graphique 1 à la page 17 dudit bulletin). Il n’apparait aucune trace des arriérés faramineux annoncés par le premier magistrat de notre pays.
Ensuite, j’ai procédé à une analyse des chiffres contenus dans le Document de Programmation Budgétaire et Economique Pluriannuel (DPBEP) 2021-2023 élaboré par le Gouvernement béninois en mai 2020. Cet exercice révèle que les variations marginales nettes cumulées des dépenses salariales entre 2015 (dernière année plein exercice de Boni Yayi) et 2019 (dernière année de plein exerce de Patrice talon), n’ont été que 24,9 milliards de nos francs.
Ce montant déjà très loin des 87 milliards annoncés, devrait être normalement en lien avec entre autres, les effets financiers des glissements catégoriels et des avancements automatiques. Mais une estimation rationnelle des données permet de postuler que ce montant ne couvrirait même pas le cumul des salaires politiques qui restent jusque-là, un mythe.
Dans quels comptes se cachent alors les arriérés du Chef de l’Etat et à qui les 87 milliards ont-ils été payés ?
Les fonctionnaires béninois devront dire au peuple béninois comment ont-ils pu bénéficier d’une telle générosité, pour que leurs conditions se soient dégradées, au regard des témoignages ambiants qui restent, qu’on le veuille ou non, un baromètre de toute gouvernance publique.
Au demeurant, on peut déduire que, non seulement les traces des dépenses au titres desquelles ces fameux 87 milliards de francs CFA auraient été engagés n’existent nulle part dans les comptes publics élaborés par le gouvernement lui-même, mais aussi que les fonctionnaires de l’Etat n’ont connu aucune embellie de leur situation salariale. En clair, il s’agit d’une invention.
En conclusion, le Président de la République a, soit été induit en erreur, soit mal lu sa fiche, soit fait économie de vérité, ou soit manipulé l’opinion publique. Quel que soit le cas de figure, cela reste indigne de la seule institution légitime que compte encore le Benin et qu’il incarne.
Aussi parait-il surprenant que ce soit pour la première fois que ce chiffre fait sa subite apparition alors même que le sport favori du régime en place a toujours été de peindre en noir, les acquis des deux quinquennats Boni Yayi dont plus de 90% des acteurs se sont recyclés dans la rupture.
D’ailleurs il n’y a aucune espèce de crédit à accorder à ces propos du Chef de l’Etat dans lesquels il affirme urbi orbi que les recettes de l’Etat se sont améliorées ‘’malgré la fermeture des frontières du Nigeria’’ alors même que les chiffres officiels indiquent le contraire et que dans la pratique, le Benin se trouve obligé de s’endetter chaque mois sur le marché international.
Encore une belle occasion de se taire vient d’être ratée.
Komi KOUTCHE